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Louise Wimmer

17 février 2012 par Jacques

film français de Cyril Mennegun, avec Corinne Masiero, Jérôme Kircher, Anne Benoît

Le cinéma s’est souvent emparé du thème de la déchéance sociale sous l’angle de la sanction de comportements individuels, le désordre amoureux, -l’ange bleue-, la faiblesse de caractère, -Barry Lindon- ou l’accident et l’alcool, -l’assommoir-. Ken Loach, Robert Guediguian ou les frères Dardenne l’ont relié au cadre économique et politique en offrant aux victimes une planche de salut par la lutte, comme un artifice capable de réconcilier la classe ouvrière avec elle-même, -les neiges du Kilimandjaro-. Louise Wimmer de Cyril Mennegun porte un regard d’une autre nature sur le déclassement, froidement clinique, sans rechercher ni la culpabilité du sujet ni sa rédemption. La déchéance sociale n’est plus l’engrenage monstrueux d’une descente aux enfers, -sans toit ni loi-, elle peut banalement s’insérer dans le quotidien de tout un chacun comme l’a rappelé avec force Malaurie Nataf et ce constat de la quasi normalisation de la précarité dans une société donnée n’en est pas moins effrayant.

 

A presque cinquante ans, divorcée, Louise dort dans le coffre de sa voiture familiale, frêle armure dans le tissu urbain d’une grande ville. Elle se réveille, enfile ses tennis, va au bistrot qui reçoit son courrier, boit un café  réglant une partie de son ardoise, se lave dans les toilettes et rejoint son emploi de femme de chambre d’hôtel avec dix minutes de retard. Séduire le gérant comme la nouvelle recrue pour obtenir un travail à temps plein? Elle n’y croit plus Louise, elle est à peine aimable avec les autres, fermée toujours, même avec ses potes de tiercé ou son épisodique amant qui ne tire rien d’elle, hors de la galipette. Du box d’un parking contenant ses derniers meubles, elle prélève les biens monnayables au crédit municipal, pour jongler avec les créanciers. Louise croise son ex mari et sa fille en étrangère, sans s’appesantir sur son infortune. Sa voiture est le support vital et seule une panne pourrait l’atteindre. Elle attend un logement locatif depuis 7 mois, un logement, pas un entretien avec une assistance sociale! Elle fait tout ce qu’il faut pour se maintenir au quotidien, remplit son réservoir en siphonnant du carburant, se nourrit en pique assiette dans les snacks, panse le spleen d’un soir en se saoulant de bière, ou s’éclate au son de la musique de Nina Simone.

 

La précarité pour Louise Wimmer n’est pas une déchéance, une prison, une voie sans issue. C’est un combat quotidien, identique à celui du malade dans sa maladie, forcément solitaire car on n’a pas d’énergie à distribuer, pas plus qu’on en reçoit de ceux qui ne possèdent que les repères sociaux traditionnels. L’itinéraire de Louise bat en brèche le concept de solidarité suggérant que certains mots clés ne sont là que pour habiller d’un voile rassurant, l’inacceptable.

 


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