
Réalisé par Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne
Avec Cécile de France, Thomas Doret, Jérémie Renier
Français , belge , italien – Comédie dramatique
1h27 – produit en 2011
Placé en foyer de jeunes, Cyril (Thomas Doret) est un pré adolescent en pleine rébellion, fugueur obstiné à la recherche de son père parti sans laisser d’adresse, en quête aussi de son précieux VTT disparu dans le déménagement, compagnon des chevauchées solitaires, unique héritage paternel, défendu bec et ongle contre la convoitise des gamins de la cité. Tel une grenouille en perdition dans le tourbillon il résiste aux animateurs qui le cernent en s’agrippant au giron d’une inconnue, Samantha (Cécile de France). Le hasard fait parfois les bonnes rencontres, Samantha retrouve et rapporte la bicyclette instrument de résistance à l’enfermement . Bonne fée, elle tend la main au blondinet en révolte en retrouvant le père (Jérémie Régnier) employé d’un restaurant. Mais le père ne veut pas du fils, ne veut plus le voir, ne peut rien pour lui. Et les enfants placés en foyer, dont la filiation se trouve niée deviennent, comme l’eau qui coule du robinet, instables et soumis à tous les courants. Surnommé pite-bull par le caïd du quartier, Cyril va peut-être se perdre dans un acte délinquant sous l’influence de ce mauvais génie ou se sauver avec Samantha, sa bonne étoile.
Fidèle à la méthode éprouvée depuis «Roseta», les frères Dardenne déroulent, sans pathos ni lyrisme, l’ histoire forte d’une gamin perdu sans le soutien de son vélo, cherchant dans sa vie le bon braquet. C’est un récit de faits et gestes bruts, dénué de psychologisme, sans condamnations ni jugements de valeur. Cyril danse au bord du gouffre, au risque de la chute fatale, toujours porteur de la rage de se relever. Samantha se tient droite, sans fierté ostentatoire et trouve d’emblée la bonne distance avec l’enfant, ni mère ni père plutôt grande sœur, écartant même, s’il faut choisir, son compagnon égocentrique. De la fragilité de la construction identitaire chez l’enfant abandonné, privé de repère (re-père!), de sa difficulté bien légitime à passer du je au nous, à admettre l’altérité hors du cercle familial, à accepter un étranger comme tuteur, un adulte avec qui pédaler au diapason dans l’acceptation de ses règles du jeux. La spirale des événements est à peine soulignée ici et là d’un air profond de Beethoven: du grand art, sobre mais percutant.