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‘Politique’ Category

  1. Les marches du pouvoir

    novembre 6, 2011 by admin

    réalisé par George Clooney

    avec Ryan Gosling, George Clooney, Philip Seymour Hoffman

    Américain – Drame

    1h35  –  produit en 2011

    La Maison Blanche au centre de complots paranoïaques est un des thèmes récurrent du thriller américain. Logiquement, la Démocratie empêche de pareilles dérives, avec ses piliers que forment la séparation des pouvoirs entre les élites, l’indépendance de la justice et j’en passe… Mais, en ces temps «d’affairisme galopant», la chimère cinématographique n’est-elle pas rejointe et même dépassée par la réalité?

    Dans «les marches du pouvoir», Geoges Clooney n’aborde pas le scandale des valises de billets où des rétro-commissions distribuées aux politiciens qui nous gouvernent. Plus minimaliste, il relate la partie d’échecs que se livrent deux candidats à l’investiture Démocrate et leurs conseillers en communication pour remporter la primaire dans l’Ohio, étape décisive pour la victoire finale à l’élection Présidentielle américaine. «Les riches ne versent pas leur dû à cette planète,… ma seule religion, c’est la Constitution des États-Unis», ce florilège appartient au charismatique gouverneur Morris (Clooney lui-même) refusant de compromettre son image d’intégrité en marchandant d’un Ministère, le soutien de son confrère de l’Ohio. «Messieurs les Conseillers, trouvez autre chose pour gagner dans cet État!»

    «Les marches du pouvoir» décrivent avec finesse et élégance ce qui ne nous surprend plus, le jeu millimétré des conseillers pour saper le camp adverse et manipuler le système médiatique, les chausse trappes de la concurrence pour garder la pôle position au sein de l’écurie de campagne, ou encore, le double visage du candidat séducteur, prônant la dignité en public, mais pratiquant l’inverse dans l’intimité de sa suite!

    Conseiller emblématique et fascinant mais piégé et déstabilisé, Ryan Gosling détient comme son maître, les ressources de Janus, usant du chantage ou de la manipulation pour se maintenir à tout prix dans le jeu! Depuis le parpaillot abjurant sa foi, le cynisme des élites a pris de l’ampleur. Mais dérouler sous nos yeux la mécanique trop bien huilée de conquête du pouvoir, ses turpitudes cachées, est un exercice salutaire.


  2. L’exercice de l’État

    novembre 6, 2011 by admin

    réalisé par Pierre Schoeller

    avec Olivier Gourmet, Michel Blanc, Zabou Breitman

    Français  –  Drame

    1h52  –  produit en 2011

    Des serviteurs masqués agencent le bureau ministériel à la manière d’un rituel d’initiation, puis une sylphide s’avance nue et se glisse dans la gueule d’un monstre tapi sur le parquet: le décorum, la séduction et le désir nourrissent le pouvoir, c’est à dire Léviathan. Ce rêve de bureau, du Ministre des transports Bertrand Saint-Jean (Olivier Gourmet), grand et riche de significations métaphoriques, est brutalement interrompu à 2 heures du matin par un appel téléphonique du Directeur de Cabinet (Michel Blanc). Dictature de l’événementiel,  le Ministre doit séance tenante se rendre en hélicoptère sur les lieux d’un accident de car, flanqué de sa Conseillère en communication (Zabou Breitman). L’exercice consiste dans l’urgence, à afficher devant caméras et micros, l’émotion et la solidarité des pouvoirs publics.  Une communication réussie conforte la cote de popularité et pérennise la carrière du Ministre, le cabinet a pour tâche de labourer ce terrain là, en continue.

    Sans appartenir au sérail des grands corps de l’État et dépourvu de fief électoral, Saint Jean a hérité d’un Ministère technique où sa rassurante bonhomie peut être utile dans l’adversité des confrontations avec les usagers où les syndicats. C’est  un modéré, presque un humaniste conscient du déficit de crédibilité de la parole politique qui rêve aussi de plénitude, peut-être d’atténuer sa coulpe en se rapprochant du peuple. Un soir, il s’invite à la table de son chauffeur, intérimaire recruté pour un mois dans le cadre d’une mesure d’affichage, sans parvenir à nouer une relation de confiance, même au prix d’un relâchement grotesque.  Isolé aussi, au sein d’un gouvernement ultra- libéral, mais lucide, il professe que «le pays vit en état de catastrophe larvé et que le gouvernement y est pour quelque chose», ne se résout pas à la privatisation annoncée  des gares et prédit qu’il ne se «planquera pas derrière son costard». Son Directeur de Cabinet  pense le contraire: «cette réforme sera votre acte de naissance».

    En suivant l’intense parcours d’un Ministre de second rang, «l’exercice de l’État» dresse le portrait d’une oligarchie entièrement dominée par la parole du «PR*», asservie à son idéologie, où les expériences humaines les plus fortes sont de peu de poids et les doutes intimes sur la conduite des affaires, balayés par les diktats de la stratégie présidentielle. Le Ministre joue son rôle au théâtre des marionnettes, psalmodie à l’ église un discours d’hommage, faute d’avoir pu le lire, toujours suivi comme son ombre par les éminences grises du Cabinet, chargées de décoder l’actualité des rivalités médiatiques, par portables ou SMS, de formater la parole publique consacrée par sondage et d’adapter en temps réel, les postures du patron . C’est vertigineux, criant de vérité et pour conclure au besoin démocratique d’achever un tel cycle politique, exact reflet du nôtre, très efficace.

    * Président de la République selon la  «novlangue» des communicants


  3. Et maintenant on va où ?

    octobre 9, 2011 by admin

    réalisé par Nadine Labaki
    avec Nadine Labaki, Claude Msawbaa, Leyla Fouad
    Français – Comédie dramatique
    1h50 – produit en 2011

    Les Hommes ont inventé les frontières, les religions ou les drapeaux pour s’identifier, au détriment d’une commune appartenance. Ces différenciations symboliques nous qualifient désormais et imprègnent nos perceptions idéologiques. Le mendiant alcoolisé là, au pied de notre église, les petits laveurs de vitres roms, au carrefour, dérangent notre vision du monde. Humain pourtant, nous exprimons notre «solidarité» en versant une obole à la fédération des œuvres laïques, au restaurant du cœur ou… au «TF1-téléthon» Ainsi va le monde, cousu de fils blancs…

    «Et maintenant où on va» dénonce les risques qui s’attachent à la disqualification d’une communauté qui n’est pas la nôtre (!)

    Musulmans et Chrétiens cohabitent en paix dans ce village montagnard au pays du Levant. Mais il suffit d’un rien pour que les fusils ressortent des cachettes, une statue mutilée de la vierge à l’église, des crottes souillant la mosquée ! Aussi, la mort accidentelle d’un enfant va-t-elle provoquer l’embrasement ?

    Cinéaste militante, Nadine Labaki fait le pari de la raison et du cœur pour juguler les instincts belliqueux. Une histoire baroque, loufoque aux portes du tragique. Un conte oriental qui débute et s’achève par un enterrement. Une cinéaste au prénom français nous rappelle avec force et vigueur que le combat essentiel, c’est de préserver la vie !


  4. Omar m’a tuer

    juin 28, 2011 by admin

    De Roschdy Zem
    Avec Sami Bouajila, Denis Podalydès, Maurice Bénichou
    Français – Drame, Policier
    1h25 – produit en  2010

    En 1991, ghislaine Marchal est découverte assassinée dans la cave de sa villa. Une inscription «Omar m’a tuer» écrite avec son sang sur la porte, envoie Omar Raddad, son jardinier marocain, en prison. Il sera condamné à 18 ans d’incarcération pour ce meurtre, par la cour d’Assises puis par la Cour d’appel, avant d’être gracié, 7 ans plus tard, par Jacques Chirac. Porté à l’écran par Roschdy Zem «Omar m’a tuer» décrit le processus policier et judiciaire qui s’abat sur le coupable désigné, un arabe illettré. Et pourtant les zones d’ombres ne manquent pas, les incohérences sautent aux yeux. De la sanglante dénonciation, au mobile supposé du crime (le vol), à la sauvagerie du meurtre, à l’absence de toute trace de l’assassin prétendu sur la victime, ou sur les lieux du crime.

    Un écrivain parisien, Jean Noël Vaugrenard va se révolter contre cette justice sommaire et mener sa propre enquête, celle que les gendarmes n’ont pas su ou pas pu mener, au foyer d’une si riche héritière. Voltaire et l’affaire Calas, Zola et l’affaire Dreyfus, l’histoire se répète quand la justice n’est plus l’équité, il faut le talent d’un écrivain humaniste pour secouer le système judiciaire.

    Deux vérités se font face, tout au long du film. Denis Podalydès incarne avec élégance l’académicien Jean Marie Rouart. Les étapes de son enquête à Nice alternent avec les séquences du procès dominé par Maurice Bénichou alias Jacques Vergès défenseur de Raddad, plus vrai que nature, verve acide comprise (« c’est la première fois que je défends un innocent »!). Comédien exceptionnel, Sami Bouajila (Omar Raddad) exprime à la perfection les tourments intérieurs de la victime toute désignée par les préjugés de notre époque. Toujours digne mais fragile, respectueux des règles, bon père et bon époux mais … analphabète et d’origine maghrébine! Alors coupable Raddad? C’est invraisemblable! Mais la justice, institution régalienne, peine tellement, comme à Outreau, à reconnaître ses erreurs !

    NB : une demande de révision du procès fondée sur la découverte non exploitée de deux traces d’ADN masculines différentes sur le corps de la victime a été rejetée par la garde des sceaux Rachida Dati.


  5. La vie des autres

    juin 6, 2007 by admin

    Ce film superbe réveille nos consciences. Le totalitarisme n’est pas une abstraction, c’est une réalité. Il sévissait à nos frontières en 1984, il sévit toujours, il a toujours ce visage hideux. Et nous fermons encore les yeux, nous continuons d’accueillir les oligarques et les despotes, épinglant même à leurs revers, des légions d’honneur. Ce qu’on appelle le réalisme économique implique que les peuples opprimés ne peuvent guère compter sur la solidarité internationale pour se défaire de leurs chaînes. En Russie, au Maroc, en Libye en Chine et autres pays érigés en « partenaires économiques », les droits de l’homme sont foulés aux pieds mais le prix du silence de l’occident est inscrit à la balance commerciale en achat d’avions, en vente de pétrole. Il faut s’interroger sur notre capacité à nous émouvoir (le temps d’un film ?) mais en ne faisant rien d’autre que de déléguer aux institutions internationales, le soin d’agir. Le despotisme qui sacrifie le faible au fort sur l’autel du système marchand a encore de beaux jours !

    L’intérêt du film réside notamment dans la galerie des portraits qui se croisent. Comment se comporter dans un monde totalitaire, quand les règles du jeu social ont fait place nette à l’arbitraire le plus absolu, quand tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains de la police politique. La plupart se résignent et se couchent (comment les en blâmer!). Ceux qui n’ont pas aboli toute conscience tentent de fuir vers l’eldorado (franchir le mûr) ; d’autres –peu nombreux- organisent la résistance. Ceux là sont pourchassés, broyés voire poussés au suicide par un système politique destructeur méthodique de ses élites et de l’intelligence de son peuple.

    L’héroïne du film consent à la compromission, servant d’objet sexuel aux puissants pour prix de l’exercice de son métier. L’amour ici n’est pas rédempteur. Il est sacrifié sur l’autel de la survie individuelle. Mais le film nous enseigne que la survie acquise dans les conditions de la lâcheté débouche sur la culpabilité. Et ce sentiment est insupportable.

    Le héros écrivain est confronté au dilemme de l’engagement dans la révolte au pouvoir en place ou dans l’acceptation de ses subsides. Il ne tranchera qu’à la fin, ce nœud gordien, pris de remord par le sacrifice de son ami. Avant cela,  il n’est pas entré dans une opposition active au régime, mais il peut basculer, il est donc l’esprit qui menace le régime et qu’il faut soumettre à la surveillance policière. Il incarne la part d’humanisme qui survit aux années de plomb pour la nécessité du témoignage.

    Tout aussi fascinant est le capitaine de la Stasi. Il est la froide mécanique dévouée à l’idéologie, le Docteur Aue des Bienveillantes. Mais le film ne dit pas ce qui fonde l’étrange conversion du personnage,  chasseur puis ange gardien. Cette transfiguration ne résulte pas d’une lecture critique de l’idéologie et son appareil répressif. Peut-être naît-elle de la découverte de l’intimité amoureuse d’un couple qui tranche avec l’austérité et la vacuité de sa propre existence. L’inquisiteur devient le sauveur du couple qu’il devait perdre en retournant au passage, les méthodes de l’oppression. La force du film est de donner à voir la possibilité de cette victoire du bien sur le mal dans un individu, dés lors que change le sens de ses actes, en s’appuyant  sur les valeurs humaines. Au risque de la déchéance… Mais cet ancien bourreau qui a perdu tout pouvoir et son statut  social retrouve, au travers d’une dédicace, un bien autrement précieux, l’estime de soi. Cette réhabilitation d’un homme, que tisse la destinée, nous touche au plus profond.